En période de crises, les politiciens surveillent les résurgences d’un passé turbulent. Comme si la France se retrouvait une nouvelle fois au bord de l’inconnu. Ces derniers jours, des portraits ou des effigies d’Emmanuel Macron ont brûlés. Les manifestants ont pris d’assaut la place de la Concorde contre la réforme des retraites. « Louis XVI, Louis XVI, ils l’ont décapité ; « Macron, Macron, on peut recommencer », chantaient certains manifestants autour du feu de camp.
Comme d’habitude, les images font le tour des réseaux sociaux
Comme d’habitude, les médias étrangers estiment avoir remarqué les signes d’une révolte. Cela rappelle de mauvais souvenirs, a déclaré le vendredi 17 mars le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin sur RTL. Son entourage assure qu’il évoque les années 1930, pas la Révolution française ni les dérives des « gilets jaunes« .
La Première ministre Elisabeth Borne a lancé l’alerte à l’Assemblée nationale, lundi 20 mars, avec toujours des propos qui rappellent la tempête. Au sein du Parlement, il y a l’antiparlementarisme à l’œuvre sur tous les fronts », a-t-elle déclaré, avant de commenter que « la vi*lence verbale est loin de la vi*lence physique« . Quelques minutes plus tôt, Mathilde Pano, présidente du groupe La France Implacable, comparait Emmanuel Macron au sanguinaire empereur romain Caligula…
Crise politique : un mal-être beaucoup plus profond que ce qu’on peut imaginer derrière la réforme
Un président de la République isolé, une première ministre affaiblie, une Assemblée nationale survoltée, la rue prise de convulsions… Ainsi, la réforme des retraites et l’usage par le gouvernement du 49.3, un outil certes constitutionnel mais vécu comme autoritaire, ont déclenché une crise politique et sociale intense. Une crise qui ravive les plaies françaises décrites à longueur d’enquêtes : la défiance vis-à-vis du pouvoir, la déconnexion entre les électeurs et les élus, la sensation d’une brutalité venue du sommet.
Cela dit, assistons-nous à une crise politique de grande ampleur ou, plus grave encore, à une crise institutionnelle ? Nous sommes face à une crise de régime, car c’est le principe même de la représentation du peuple par des élus, celui hérité de 1789 et sur lequel s’appuient nos institutions, qui est remis en cause. Cependant, l’idée même du vote s’essouffle, il ne suffit plus à créer un lien durable, analyse le professeur Dominique Rousseau. Le 49.3 constitue la traduction institutionnelle de l’adage or, « Ce n’est pas la rue qui gouverne »,depuis plusieurs années, il y a une demande des citoyens d’être plus associés. Ça crée quelque chose qui va au-delà d’une crise politique.